Comme promis, dimanche dernier j’ai marché. J’ai marché contre le viol. J’ai marché contre les violeurs. J’ai marché contre cette inhumaine atrocité que des gens n’ont pas honte de se revêtir. J’ai fait mes pas avec courage, avec beaucoup de fierté aussi, pour dire non. Catégoriquement non.
A aucun moment Jasmine, je ne me suis senti fatigué. J’étais motivé. Motivé à un point tel, que j’aurais même pu marcher de Port-au-Prince à Jérémie, de sorte que les violeurs puissent voir mes courageux pas, vers eux, pour qu’ils comprennent la nécessité de changer, de devenir humain et de se déshabiller de leur monstruosité.
Mais le parcours étant déjà fixé Jasmine. Je n’ai donc fait que de Turgeau à Champ de Mars.
Avec fierté, j’ai marché pour la liberté des filles, des demoiselles et de ces femmes auxquelles appartient aussi ce pays. J’ai marché pour des amies, que j’ai connues il y a longtemps, que je viens de connaître aussi, qui prennent la rue presque chaque jour, par nécessité, par obligation. J’ai marché pour mes petites sœurs. J’ai marché pour ma mère. J’ai surtout marché pour ma fille. La toute dernière. Danilee.
Je n’étais pas seul. Il y a eu des amis et Daniella était avec moi. Mais sincèrement, une fois chez moi, je me suis mis à réfléchir à cette conversation qu’on a eue, dix ans de cela au petit restaurant du quartier, où je me rappelle bien – tu disais que tu voulais de toutes tes forces combattre certaines pratiques dans cette société qui ne fait malheureusement que nous tirer vers le bas. Pour certains s’il s’agit de pouvoir, au fond, ce n’est que lâcheté. Pas plus.
Les mots que tu prononçais ce jour-là , me sont remontés à l’esprit et c’est là Jasmine – oui, à partir de ce moment – que je me suis rendu compte combien le viol est pratiqué et combien aussi, les violeurs sont partout.
Effectivement Jasmine, ils ne sont pas tous de bandits de grand chemin, habitant les quartiers populaires. Les violeurs habitent aussi les quartiers huppés, travaillant dans les grandes entreprises et occupent des fois d’importantes fonctions politiques.
Tu disais vrai et sincèrement, plus de gens sont violés que ce qu’on croit. Parce qu’être violé.e, c’est plus que se faire enculé par quelqu’un qu’on ne connaît pas et qui nous a forcé à le subir sexuellement.
Des femmes sont violées par leurs patrons Jasmine, mais refusent d’en parler parce qu’elles ont peur d’être révoquées. D’autres sont violées par des autorités publiques, mais ne réagissent pas parce qu’elles ont peur de laisser leur vie.
Les violeurs sont partout Jasmine. A l’église, à l’école, à l’université. Il y a des professeurs qui voilent leurs étudiantes. Et pire, il y a des étudiants qui dans les espaces universitaires violent leurs camarades étudiantes.
Sincèrement Jasmine, tu es partie tôt. Vraiment trop tôt. Parce que j’imagine toute la fourgue que tu aurais mise à lutter contre cette pratique, sous toutes ses formes.
La société est malade Jas.
Les violeurs sont partout et sournois.
Et le viol, je crois, est un mal qu’il faut combattre sous toutes ses formes et avec la dernière rigueur. C’est pourquoi, j’ai décidé de continuer à marcher et de toujours garder dans ma voiture une pancarte que je pourrai brandir à n’importe quelle heure, n’importe où, de sorte que je puisse ébranler les violeurs, à chaque fois qu’ils aient la malchance de me croiser.
Je veux les tourmenter. J’imagine que tu aurais fait pareil.
Bonne journée Jas…
Roudy Stanley PENN