Si le chant du coq constitue un patrimoine protégé des campagnes, la commune de Nivolas-Vermelle (Isère) où chante Ricco se trouve dans un territoire périurbain, selon la classification de l’Insee, a fait valoir la plaignante.
Un coq peut-il chanter dans sa basse-cour quand la ville grignote sur la campagne ? Le tribunal de Bourgoin-Jallieu s’est penché sur la question mardi lors d’une audience opposant les propriétaires du coq Ricco à leur voisine excédée de la commune de Nivolas-Vermelle, dans le nord de l’Isère. Ricco est accusé de chanter trop fort et trop souvent par sa voisine, installée en 2021, qui réclame son départ, ainsi que 4500 euros de dommages et intérêts à ses propriétaires Alexia et Franck Charreton, habitants du quartier depuis 25 ans et propriétaires du coq depuis 2019.
«Ce n’est pas normal d’arriver dans un lieu où il y a une certaine identité et de vouloir tout changer», a dénoncé très émue Alexia Charreton, qui vit avec son mari, ses poules et Ricco dans l’ancienne grange d’une ferme, au sud de l’agglomération lyonnaise, une «zone rurale» a-t-elle défendu devant les juges. Cette question de la limite entre la ville et le monde rural est au cœur du dossier: le chant des coqs est reconnu comme un «patrimoine sensoriel» des campagnes – et donc protégé – par le droit français depuis 2021. Mais la zone du litige est «faite pour être habitée, on n’est pas en rase campagne», a argumenté l’avocat de la plaignante, Me Briac Moulin, s’appuyant sur les données de l’Insee qui classe la zone Nord-Isère comme un «territoire périurbain» s’étant développé sous l’influence de l’agglomération lyonnaise.
Une pétition de 33.000 signatures en faveur de Ricco
«Dormir est un besoin fondamental, posséder un coq n’en est pas un», a-t-il asséné, ajoutant qu’«avoir un coq en ville revêt un caractère d’anormalité». Sa cliente reproche à Ricco de chanter «fréquemment» «tôt le matin» mais aussi pendant la journée, une nuisance qui, selon son conseil, a même contraint d’anciens voisins «empêchés de dormir» à déménager. Un «fantasme» selon les propriétaires de Ricco, qui assurent leur propre défense et affirment être soutenus par les autres voisins, ceux-ci «apprécient même» le «joli» chant de leur animal, a certifié à l’audience Alexia Charreton.
Le couple a lancé une pétition recueillant près de 33.000 signatures et a installé une webcam qui filme en continu leur basse-cour, dans laquelle Ricco sort à 8h30 du matin l’hiver et à 9h00 l’été. Ils expliquent avoir décompté le fameux cocorico au maximum «5 à 6 fois dans la journée». La décision a été mise en délibéré au 4 juillet. Ricco n’est pas le premier coq à faire face à la justice : en 2019, le coq Maurice était devenu un emblème de la ruralité après avoir été autorisé à continuer de chanter à l’issue d’un conflit de voisinage.
Par Le Figaro